Sophie Corbin Avocat

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Dans les familles recomposées, la loi reconnait à l’époux le droit à un quart de la succession de son conjoint décédé.

Ce droit prévu par la loi, dit « droit légal » n’interdit pas les legs, qui sont le plus souvent réalisés par testament.

La question de se pose de l’articulation entre le droit légal (1/4) et les legs : doit-on les ajouter les uns ou autres, dans la limite toutefois de la réserve des héritiers, ou doit-on les combiner entre eux et si oui, comment ?

Par un arrêt du 17 janvier 2024, la Cour de cassation a dit qu’il faut imputer.

Les legs doivent être « pris » sur le quart du conjoint, c’est-à-dire qu’on les déduit de ce quart. Si le quart n’est pas atteint une fois les legs imputés, alors le conjoint peut demander le complément. Si les legs dépassent le quart, il ne peut rien demander au titre de ce quart, absorbé.

La Cour de cassation en a profité pour préciser comment évaluer des droits quant ils sont de nature différente. Dans les successions, il n’est pas rare en effet qu’on doive combiner des droits en pleine propriété et des usufruits.

On doit convertir les usufruits pour en obtenir la valeur en pleine propriété, ce qui permettra de procéder aux imputations.

Cela donne, en langage juridique la formule suivante :

« pour la détermination des droits successoraux du conjoint survivant, les legs consentis à Mme [M] devaient d’abord, non pas se cumuler, mais s’imputer en intégralité sur les droits légaux de celle-ci, de sorte qu’il y avait lieu de calculer la valeur totale de ces legs, en ajoutant à la valeur des droits légués en propriété celle, convertie en capital, des droits légués en usufruit, et de comparer le montant ainsi obtenu à la valeur de la propriété du quart des biens calculée selon les modalités prévues à l’article 758-5 du code civil »

La question de la détermination de la résidence du défunt est importante, car c’est elle qui détermine le juge compétent et la loi applicable, qui sont ceux de la « résidence habituelle au jour du décès ».

Prenons le cas d’un père qui établit un testament pour déshériter ses enfants : la plupart des lois n’y voient pas d’inconvénient.

Si c’est en revanche la loi française qui est applicable, le testament sera « réduit » pour que la part que le droit français réserve aux enfants soit respectée: c’est ainsi entre la moitié et les ¾ de la succession qui sont « sauvés » pour les enfants !

La résidence habituelle au jour du décès n’est pas le lieu de décès, qui peut être non significatif, comme par exemple lorsque le décès survient au cours d’un voyage à l’étranger.

Et parfois, il est difficile de savoir quelle était la résidence habituelle.

Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 12 juillet 2023, M. X avait décidé de s’installer pour sa retraite en Portugal. Il s’y est installé le 28 juin 2016 et y est décédé 5 mois plus tard, le 20 novembre 2016.

Devait-on retenir que sa résidence habituelle était en France, où il avait vécu tout sa vie, ou au Portugal, où il n’avait vécu que 5 mois, mais avec l’intention de s’y installer et où il était décédé ?

La question avait un enjeu fort : M. X avait déshérité par testament ses enfants … Selon que la loi française ou portugaise s’appliquait, ils avaient trois quarts ou… rien de la succession de leur père !

Les enfants soutenaient que le départ au Portugal s’inscrivait dans le cadre d’une fraude qui visait à obtenir l’application de la loi portugaise et ainsi à les priver de la réserve prévue pour eux par le droit français.

La Cour de cassation leur a donné raison, mais pas sur ce terrain. Elle a effectué une analyse très concrète de la situation de M. X.

Elle a constaté que, bien qu’installé au Portugal, M. X n’y avait vécu que 5 mois, qu’il ne parlait pas le portugais, qu’il était toujours inscrit sur les listes électorales françaises, qu’il avait toujours une maison en France, où vivaient sa famille et ses amis. Elle en a déduit que la dernière résidence était la France et qu’en conséquence, le juge français était compétent, la loi française applicable et que la réserve devait être respectée.

La prescription renvoie au délai durant lequel une action en justice peut être intentée. Une fois ce laps de temps écoulé, l’action ne peut plus être entreprise. Ce délai est en principe de 5 ans, mais il existe de nombreuses exceptions.

Connaître le délai est une chose, mais il faut aussi savoir à quel moment il commence et comment on le décompte.

Un père avait été placé en 2004 sous tutelle, l’un de ses fils, Xavier, étant son tuteur.

Au décès de son père, en 2008, Xavier découvre à l’occasion du règlement de la succession que de nombreuses opérations, très douteuses, avaient été effectuées par son père en 2001 et 2002, c’est-à-dire avant l’ouverture de la tutelle.

Xavier saisit le juge d’une demande d’annulation de ces opérations, sur le fondement de « l’insanité d’esprit » c’est-à-dire en soutenant que son père n’avait déjà plus, en 2002, toute sa tête.

La cour d’appel rejette ses demandes, en les déclarant prescrites. Selon la cour d’appel, la prescription de 5 ans avait commencé à courir au jour de l’ouverture de la tutelle, en 2004. L’action, introduite en 2012, soit plus de 5 ans après, était prescrite.

La Cour de cassation n’est pas de cet avis et casse et annule la décision de la cour d’appel.

Dans un arrêt du 13 décembre 2023, elle rappelle que le jugement de tutelle a eu pour effet d’interrompre la prescription, qui ne reprend qu’au jour du décès.

Or, avant l’ouverture de la tutelle, la prescription n’était pas encore acquise. Par la suite, elle a été suspendue durant toute la durée de la tutelle. Elle a recommencé à courir après le décès, mais Xavier a agi dans le délai de 5 ans.

Il s’agit d’un régime matrimonial peu utilisé, et pourtant intéressant.

Il fonctionne, durant le mariage, comme une séparation de biens.

Mais au moment de la liquidation, on compare, pour chaque époux, son patrimoine originaire (celui qu’il avait quand il s’est marié) et son patrimoine final (celui qu’il a au moment de la séparation). On partage l’enrichissement de chacun en deux et on attribue à chacun la moitié de l’enrichissement de l’autre.

La philosophie de ce régime est ainsi à la fois individualiste et égalitaire : il n’y a pas de mise en commun des biens, même acquis pendant le mariage, mais l’enrichissement acquis durant le mariage est partagé.

Dans une décision du 13 décembre 2023, la Cour de cassation a précisé qu’on doit tenir compte de l’enrichissement quelle que soit son origine. On ne doit ainsi pas s’en tenir aux apports de capitaux, mais aussi à la valorisation résultant du travail de l’époux.

Il s’agissait d’un fonds de commerce de pharmacie : il avait pris de la valeur grâce au travail de l’épouse pharmacienne, qui n’avait cependant procédé à aucun travaux.

La cour d’appel a refusé de tenir compte de la prise de valeur résultant de l’« apport en industrie » de l’épouse.

La Cour de cassation casse et annule :

Vu les articles 1569, 1571 et 1574 du code civil

8. Selon le premier de ces textes, pendant la durée du mariage, le régime de participation aux acquêts fonctionne comme si les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. A la dissolution du régime, chacun des époux a le droit de participer pour moitié en valeur aux acquêts nets constatés dans le patrimoine de l’autre, et mesurés par la double estimation du patrimoine originaire et du patrimoine final.

9. Selon les deux textes suivants, les biens compris dans le patrimoine originaire comme dans le patrimoine final sont estimés à la date de la liquidation du régime matrimonial, d’après leur état au jour du mariage ou de l’acquisition pour les biens originaires et d’après leur état à la date de la dissolution du régime pour les biens existants à cette date.

10. Il en résulte que lorsque l’état d’un bien a été amélioré, fût-ce par l’industrie personnelle d’un époux, il doit être estimé, dans le patrimoine originaire, dans son état initial et, dans le patrimoine final, selon son état à la date de dissolution du régime, en tenant compte des améliorations apportées, la plus-value ainsi mesurée venant accroître les acquêts nets de l’époux propriétaire.

Les efforts déployés par l’épouse pour développer son commerce sont ainsi pris en compte et doivent être partagés avec son époux.

Cette décision met en évidence la différence entre ce régime et celui de la communauté de biens réduite aux acquêts : dans un tel régime en effet, on n’aurait pas tenu compte du travail de l’épouse, qui n’aurait généré aucune récompense, faute d’apports en capital.

Participation à la table ronde organisée par le CLAVIM et LANAE (association nationale des auditeurs d’enfants) sur l’audition de l’enfant, notamment dans le cadre du divorce à l’amiable de ses parents.

L’enfant n’a pas à choisir entre ses parents, mais a souvent des choses à leur faire savoir.

Sa parole doit être accueillie et transmise aux parents, qui pourront mieux l’entendre si elle leur est transmise par un tiers neutre que si c’est l’enfant lui-même qui le dit.

L’accueil de la parole de l’enfant est faite par un praticien spécialement formé, selon un protocole rigoureux mais bienveillant et en toute neutralité au regard du conflit des parents, qui n’est pas celui de l’enfant.

Sophie Corbin est praticienne certifiée, titulaire du DU Auditeur d’enfant de l’ICP de Lille et membre de LANAE et de la CLIA, deux associations des professionnels de l’audition d’enfants.

Les stock-options sont un instrument utilisé par les entreprises pour intéresser leurs cadres et les fidéliser. Très schématiquement, l’entreprise donne à son salarié le droit d’acheter des actions à un prix fixé à l’avance, à une échéance généralement fixée à 3 ou 5 ans.

Comment concilier cette opération, qui s’étend, entre l’octroi du droit d’option et l’acquisition effective, sur plusieurs années et le divorce ?

Dans un arrêt du 25 octobre 2023, la Cour de cassation a jugé que :

5. Il résulte des articles 1401, 1404 et 1589 du code civil et de l’article L. 225-183, alinéa 2, du code de commerce que, si les droits résultant de l’attribution, pendant le mariage, à un époux commun en biens, d’une option de souscription ou d’achat d’actions forment des propres par nature, les actions acquises par l’exercice de ces droits entrent dans la communauté lorsque l’option est levée avant sa dissolution.
 
6. Après avoir rappelé cette règle, la cour d’appel a retenu à bon droit que seules les soixante-huit actions levées par M. X au jour de l’ordonnance de non-conciliation devaient être intégrées à l’actif de la communauté.

Concrètement, c’est la date à laquelle l’action est achetée (aux conditions fixées plusieurs années avant) qui est prise en compte pour savoir si l’action est propre (non partagée) ou commune (partagée avec l’époux).

La solution avait déjà été retenue par la Cour de cassation en 2014 mais il s’agissait d’une décision déjà ancienne et critiquée par certains. L’arrêt de 2023 vient donc consolider la solution.

La date des effets du divorce étant fixée à la date de l’assignation en divorce (anciennement date de l’ordonnance de non-conciliation), il faut prendre en compte les éventuels droits d’option (et donc réaliser un audit précis de la situation des époux) avant d’assigner.

Les parents constituent souvent une épargne pour leurs enfants, en leur ouvrant un compte : livret A, Livret Jeune ; compte courant.

Ils alimentent ce compte, en se disant qu’ils pourront toujours récupérer cet argent en cas de nécessité.

Or, dès lors que le compte est ouvert au nom des enfants, les versements effectués par les parents constituent des libéralités et ne peuvent être repris.

En revanche, les parents ont, jusqu’à la majorité de leur enfant, la jouissance légale de son patrimoine. Cela veut dire s’ils ne peuvent toucher au capital, ils peuvent percevoir les revenus à condition de les employer pour l’entretien de l’enfant. En cas de surplus, ils peuvent en disposer pour eux-mêmes.

En pratique, il est fréquent qu’au moment du divorce, un des conjoints vide les comptes bancaires y compris celui des enfants, soit qu’il considère que c’est son argent, soit pour éviter que l’autre parent prenne l’argent. Il n’en a pas le droit, mais c’est le plus souvent techniquement possible, depuis l’interface de gestion de la banque.

Il est dès lors prudent, quand la relation se dégrade, de rappeler à l’établissement bancaire qui gère le compte de l’qu’il a interdiction d’exécuter un ordre de virement sans l’accord des deux parents.

L’hypothèse est très fréquente : mariés sous le régime de la séparation de biens, c’est pourtant ensemble que les époux achètent le logement de la famille. Très souvent, alors que l’acquisition a été faite à part égale, à « 50/50 », l’un des époux finance plus que l’autre, soit qu’il prenne en charge les remboursements d’emprunt pendant que l’autre paie les frais de la vie courante, soit que l’un fasse apport d’un capital personnel.

Lors du divorce, l’époux qui a payé davantage demande des comptes à son conjoint.

La solution a connu un bouleversement radical depuis 2013.

L’hypothèse est très fréquente : mariés sous le régime de la séparation de biens, c’est pourtant ensemble que les époux achètent le logement de la famille. Très souvent, alors que l’acquisition a été faite à part égale, à « 50/50 », l’un des époux finance plus que l’autre, soit qu’il prenne en charge les remboursements d’emprunt pendant que l’autre paie les frais de la vie courante, soit que l’un fasse apport d’un capital personnel.

Lors du divorce, l’époux qui a payé davantage demande des comptes à son conjoint.

La solution a connu un bouleversement radical depuis 2013.

La jurisprudence considère dorénavant que celui qui a financé davantage que sa quote-part dans le bien l’a fait au titre de la contribution aux charges du mariage et que par conséquent, il n’a aucune créance contre son conjoint.

Cette neutralisation des créances par la contribution aux charges du mariage ne vaut que pour le remboursement des échéances d’emprunt. En revanche, si l’époux a investi un capital personnel, il peut demander à en être remboursé.

Il faut donc distinguer, au moment des comptes, selon que le logement familial acquis en indivision a été financé par un apport en capital ou par le remboursement d’échéance d’emprunt.

Dans un arrêt du 5 avril 2023, la Cour de cassation a rappelé ce principe (pourvoi n°21-22296), en l’appliquant au financement par un époux des travaux effectués sur le logement, propriété exclusive de son conjoint :

« Vu l’article 214 du code civil : 4. Il résulte de ce texte que, sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, réalisé par un époux séparé de biens pour financer l’amélioration, par voie de construction, d’un bien personnel appartenant à l’autre et affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage ».

La délégation d’autorité parentale (DAP) permet de confier l’exercice de l’autorité parentale à un « proche digne de confiance » (article 377 cc).

Cette personne peut ainsi aller chercher l’enfant à l’école, participer aux choix concernant son mode de vie et son éducation : régime alimentaire (vegan, kasher, halal…), éducation religieuse, choix de l’école et des activités extra-scolaires… Elle pourra consentir aux soins, ou les refuser.

La DAP est très utile dans les familles recomposées, au profit du beau-père ou de la belle-mère, ou dans les couples gay ou lesbien, au profit du conjoint du parent biologique.

Dans une série d’arrêts du 21 septembre 2022, la Cour de cassation a précisé deux choses, s’agissant de la personne qui peut recevoir la délégation.

  • Il peut s’agir de deux personnes, par exemple un couple.
  • Ce doit être un proche de la famille.

Le contexte dans lequel les arrêts du 22 septembre ont été rendus était très particulier.

S’appuyant sur l’institution traditionnelle polynésienne du fa’a’amu, qui est le fait, pour des parents démunis, de confier leur enfant à une personne qui pourra l’élever sans pour autant rompre le lien de filiation, une pratique s’est développée par laquelle des couples métropolitains se font confier des enfants dans l’attente de pouvoir les adopter, ce qui n’est possible que lorsque l’enfant a 2 ans. En attendant de pouvoir adopter, les futurs parents élèvent l’enfant dans le cadre d’une DAP.

La Cour de cassation, appelée à se prononcer sur cette pratique, l’a condamnée : la DAP ne peut intervenir qu’au profit d’un proche de la famille de l’enfant, ce que ne constitue pas les candidats à l’adoption, qui entrent en relation avec les parents biologiques juste avant l’accouchement et qui repartent en métropole avec l’enfant en attendant de pouvoir l’adopter.

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000046330357?init=true&page=1&query=papeete+d%C3%A9l%C3%A9gation+d%27autorit%C3%A9+parentale+&searchField=ALL&tab_selection=all

On oublie souvent que l’associé est une personne et que le droit
des sociétés doit être concilié avec celui des régimes matrimoniaux.

Il faut commencer par identifier si l’associé est marié sous le
régime de la communauté ou celui de la séparation de biens.

S’il est marié en séparation de biens, les parts lui appartiennent,
en principe, et il est seul associé.

S’il est marié en communauté, c’est plus compliqué.

Si les parts ont été acquises avant le mariage ou avec de l’argent
reçu par donation ou héritage, les parts lui appartiennent.

S’il les a acquises pendant le mariage avec ses salaires (il doit
avertir son conjoint, puisque les fonds de la communauté sont exposés à des pertes), elles sont « en communauté » c’est-à-dire qu’il en est titulaire avec son conjoint.

Deux conséquences : la valeur des parts, en cas de séparation, devra être partagée par moitié entre les deux époux. Concrètement, l’associé devra payer à son conjoint la moitié de la valeur de « ses » parts.

Mais qu’en est-il des droits d’associés ?

Dans un arrêt du 21 septembre 2022 (pourvoi n°19-16203), la
chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que l’époux commun en biens acquiert personnellement la qualité d’associé s’il en fait la demande à la société, sans qu’il soit nécessaire qu’il se soit impliqué dans la vie sociale. La qualité d’associé, s’agissant du conjoint, n’exige pas l’affectio societatis qui est en principe exigée de l’associé. C’est l’apport de l’arrêt du 21 novembre 2022.

Précisons que cette solution, fondée sur l’article 1832-2 cc ne
concerne pas les sociétés dont les titres sont négociables.

Concrètement, le conjoint reconnu associé peut exercer les droits
liés à la qualité d’associé (droit de vote et droit de communication).

Dans le cas jugé par la Cour de cassation, l’époux de la gérante
demandait à la société de le reconnaître en tant qu’associé et de lui communiquer les bilans, les comptes sociaux et les procès-verbaux d’assemblées générales, ce que la société, représentée par sa gérante (son épouse donc), lui refusait. Ambiance. 

La Cour de cassation a donné raison à l’époux, en retenant qu’il avait personnellement la qualité d’associé et pouvait à ce titre réclamer la communication de tous les documents sociaux.

Ce droit de communication est fort utile en cas de divorce
puisqu’il permet à l’époux de connaître la situation exacte de la société et de déterminer ainsi ses droits pour le calcul de la prestation compensatoire et dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial.

Cette situation peut en revanche être dangereuse pour la société, rendue ainsi tributaire des problèmes conjugaux de son associé. Le conjoint, devenu associé, devient en effet titulaire du droit de vote pour la moitié des parts de l’associé et peut gravement perturber le fonctionnement social, et ceci d’autant plus qu’il n’est pas exigé de lui qu’il soit animé de l’affectio societatis.

C’est la raison pour laquelle il est prudent de faire renoncer
l’époux de l’associé à la qualité d’associé : ce peut être fait lors de
l’acquisition des parts mais aussi à tout moment, jusqu’au prononcé du divorce.
Cette renonciation peut être tacite : c’est l’autre apport de l’arrêt du 21 novembre 2022.

Il est prudent également de vérifier si vos associés ont fait renoncer leurs conjoints respectifs.

Dans un arrêt du 12 janvier 2022, la Cour de cassation a apporté une précision importante en matière de libéralités entre conjoints : elle a jugé que « la présomption de dispense de rapport des legs prévue à l’article 843 du code civil est inapplicable au conjoint survivant ».

Explication.

Dans une succession, il faut procéder au rapport des donations et des legs.

De son vivant, le défunt peut en effet avoir consenti des donations à certains de ses enfants : si, au moment du règlement de la succession, on n’en tient pas compte, un enfant peut se trouver avantagé au détriment des autres.

Pour éviter un tel déséquilibre, la loi prévoit que les donations sont rapportables : cela signifie qu’on reconstitue les biens du défunt comme s’il n’y avait pas eu de donation. L’enfant qui a bénéficié de la donation n’est pas tenu de restituer ce qu’il a reçu, mais sa part sera diminuée d’autant.

Si le parent qui consent une donation à l’un de ses enfants souhaite en revanche l’avantager, par exemple parce qu’il a eu moins de chance que ses frères et sœurs, ou parce qu’il lui apporte une aide au quotidien, il peut tout simplement en spécifiant que la donation est non rapportable.
Le principe est donc que la donation est rapportable, sauf si elle ne l’est pas. Pour le legs, c’est tout le contraire : il n’est pas rapportable, sauf s’il est précisé qu’il l’est. Dans son arrêt du 12 janvier 2022, la Cour de cassation a précisé que la règle de la dispense de legs, qui est le principe, ne concerne pas les legs faits au conjoint survivant.

Si un époux veut, par testament, favoriser son conjoint, il doit donc préciser expressément que le legs qui lui est fait n’est pas rapportable, c’est-à-dire qu’il ne viendra pas en déduction des droits sur la succession dont bénéficie le conjoint survivant.

Dans un arrêt du 13 avril 2022, la Cour de cassation rappelle que le testament partage doit opérer le partage des biens de la succession (et non prévoir seulement des facultés l’attribution):


« Le testament-partage est un acte d’autorité par lequel le testateur entend imposer le partage ».


La solution est dans le droit fil de la jurisprudence de 2013, qui a imposé que la donation-partage opère un partage effectif des biens (et pas la donation de quote-parts).